La nuit s'étalait en un rêve étrange et doux...

La nuit s'étalait en un rêve étrange et doux, la brume s'étirait comme un sourire, la rue finissait de
s'endormir sous mes pas. Seules quelques âmes en dérive erraient encore ça et là. Tout à mes
pensées intimes, je marchais comme un automate dans une rue sans lumière, comme un train
suivant les rails par habitude, un bateau heurtant les vagues sans passion, une goutte d'eau glissant
sans raison...

J'allais devant moi avec l'obscur sentiment de m'égarer tandis qu'en moi une voix cherchait à se
frayer un passage, une voix qui me disait de m'arrêter. Mais voulais-je entendre ? J'étais subjugué
par l'irrépressible envie d'une fuite en avant dont pourtant je savais que je ne tirerai rien.

Quelque part dans le ciel, j'entendais les cris d'un oiseau perdu, compagnon fortuit de mon étrange
silence, parcelle de vie suspendue dans les airs... Je m'attendais à ce que ce petit frère dans
l'incertitude finisse par trouver sa voie et m'abandonne à la nuit. Mais peut-être finalement était - ce
moi qu'il cherchait car je le vis soudain se poser à deux pas de moi, petit geai aux yeux impertinents
qui m'interrogeait de son regard. Que me voulait donc cet ami des airs, ce complice des vents, cet
intime des nuages ? Quelles réflexions muettes hantaient ce petit animal ? Qu'avait - il vu qui m'ait
échappé ? Avait - il saisi le sens de cette nuit intrigante ?

Je me trouvais sans aucun doute acteur d'un songe étrange. Il me semblait que quelque force
impérieuse cherchait à se manifester. Une sourde impatience que revienne le jour commençait à
poindre, le rêveur solitaire que j'étais tournait en rond dans sa thébaïde. Il me tardait soudain qu'un
petit vent de folie souffle sur ma vie et viennent balayer d'imprudentes promesses...

Sexey les Bois
27.01.1996

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